20 Mai 2024
Article de Léo Tamaki - publié le
Aujourd’hui les arts martiaux et sports de combats sont pratiqués à travers le monde. Mais que différencie ces pratiques aux noms exotiques ?
Les arts de combats sont souvent classés selon le type de technique dominant dans la discipline, les projections pour le Judo, les coups frappés pour le Karaté, etc… Mais cela est surtout valable pour les arts modernes qui se sont spécialisés, les disciplines anciennes ayant généralement eu un éventail technique beaucoup plus large. La différence essentielle tient au but de ces pratiques. Je prendrai ici l’exemple des pratiques martiales japonaises dont les différences sont assez explicites. Je simplifierai en divisant ces disciplines en trois catégories, les Bujutsu, les Budo et les Kakutogi.
Historiquement les premiers à avoir fait leur apparition sont les Bujutsu. La traduction littérale de Bujutsu est « technique martiale ». Les Bujutsu recouvrent l’ensemble des anciens Ryu japonais, les écoles martiales traditionnelles. La création des principaux ryu s’étale sur plusieurs siècles et certains remonteraient aussi loin que le 6ème siècle. Les Ryu possédant les plus anciennes traces écrites de leur existence remontent déja au 15ème siècle.
Les Bujutsu furent donc systématisés à des époques où les combats à mort étaient soit fréquents soit possibles. Ils ont eu pour but primordial l’efficacité en combat de survie, que ce soit sur un champ de bataille, dans une embuscade ou lors d’un duel. De fait leurs techniques sont centrées sur une efficacité impitoyable car la vie de leurs adeptes en dépendaient. Les Bujutsu devaient permettre à leurs pratiquants de survivre à une confrontation même en infériorité numérique, blessés et désarmés.
Les Budo sont apparues entre la fin du 19ème siècle et le milieu du 20ème. Ils sont souvent les descendants directs des Bujutsu, le Jujutsu ayant donné naissance au Judo, le Kenjutsu au Kendo, le Iaijutsu au Iaido, etc… La tradition littérale de Budo est « voie martiale ». Leur but est l’éducation du corps et de l’esprit à travers des techniques martiales. Le but fondamental n’étant plus le combat de survie de nombreuses techniques disparurent ou furent modifiées.
Les Kakutogi sont apparus à partir du milieu du 20ème siècle. Leur traduction littérale est « technique de combat ». Ils s’agit de tous les « sports » de combat. Au Japon ce terme recouvre surtout ce qu’on appelle en occident le MMA (mixed martial arts, disciplines enseignant des techniques de frappes, projections et immobilisations dans l’objectif d’une confrontation sur ring). Les techniques de Kakutogi sont destinées à des combattants se mesurant dans un cadre très précis. Combattant un contre un sur une surface limitée dans un lieu, un jour et pendant un temps déterminés les pratiquants de ces disciplines cherchent à vaincre leur adversaire sans lui infliger de blessures graves. Les techniques les plus dangereuses pour l’intégrité de leurs adversaire sont donc bannies.
Les trois principales catégories définies il n’est toutefois pas toujours évident de déterminer le groupe auquel appartient une discipline. Les ryus traditionnels ont généralement conservé intactes les techniques destructrices des samouraïs mais leur pratique vise à présent généralement la formation de l’homme en tant qu’être humain à travers notamment la concentration et la précision nécessaires à la pratique plus qu’à former des machines de guerre.
Les Budo comme le Judo, le Karaté et parfois même le Kendo ont de plus en plus tendance à mettre l’accent sur la compétition en reléguant l’éducation au second plan et se confondent souvent avec les Kakutogi comme la présence de nombreux champions de Judo dans les compétitions de type Pride (plus grande compétition de combat libre au monde se déroulant au Japon) l’atteste.
Les Kakutogi quand à eux ont une situation plus claire bien que certains développent une pratique pour les non-compétiteurs qui s’inspire des Budo traditionnels.
Ces classifications sont bien sûr très sommaires et Donn Draeger entre autre écrivit énormément sur ce thème. Elles peuvent toutefois apporter un éclairage sur les différentes pratiques du paysage martial actuel.